Tu veux de l'eau ?
Nous sommes le lundi 4 mai, il doit être environ 5h30 du matin, heure de Paris. Nous sommes vraisemblablement quelque part au-dessus du Moyen-Orient, peut-être même approchons-nous déjà de l'Inde. Je n'en sais trop rien car je ne suis pas en cabine mais au poste repos du 777-300 qui nous emmène vers Singap'. L'oiseau a pris son envol vers minuit. Nous avons effectué le service en un peu plus de 2h (une performance étant donné que les 67 sièges de la cabine Affaires étaient ce soir occupés), et cela fera bientôt 3h30 que je lutte contre l'adrénaline qui coule encore dans mes veines, après ce service-marathon. Je n'aspire qu'à une chose : m'endormir en sursaut.
Et puis vient le moment tragique. Une main passe à travers le rideau qui m'isole du couloir du Crew-Rest et me tapote l'épaule. C'est l'heure. Je lève le pouce en guise d'accusé-réception. Quelques secondes plus tard, j'ouvre les yeux. J'ai la sensation que je viens de me réveiller. Je me rappelle pourtant clairement de mon collègue et de sa main-réveil-tapotante. Ok, attend !, me dis-je... Ai-je rêvé qu'on m'a réveillé ? Ai-je été réellement arraché aux bras de Morphée, puis suis-je reparti derechef in Slumberland, en bon Little Nemo des airs ? Comment savoir ? Mais Comment savoir ? Je sens presque là-haut dans mon cerveau mes neurones qui s'activent, qui agitent axones et dendrites en quête de connexion. La fatigue, et peut-être l'altitude de la cabine m'empêchent de réfléchir. Et voilà ! La connexion tant attendue se réalise. Quelque part dans les profondeurs de mon cerveau, un neurone endormi doit se réveiller, un collègue lui ayant chatouillé le dendrite. Et la logique réinvesti les lieux. Ma montre. Si je regarde l'heure, je saurai puisque je sais à quelle heure prenait fin mon tour de repos. Oh je te vois sourire, peut-être te moquer, Ami Terrien ! C'est vrai qu'il y a de quoi. Mais c'est comme ça : au milieu de la nuit, à la croisée des fuseaux horaires, à 2000 ou 2500m d'altitude en termes de pression d'oxygène, notre pauvre cerveau est parfois en manque de repères...
Je regarde ma montre. Victoire. Il reste exactement cinq minutes avant qu'un vrai collègue vienne procéder à un vrai réveil. Mon inconscient, lui, avait compté les heures et les minutes avec l'exactitude d'un chronomètre suisse, et m'avait envoyé un lapin blanc à l'heure pour m'extirper des limbes. Quant à moi, je m'étais bel et bien endormi en sursaut...
Le lapin en question arrive comme prévu quelques minutes plus tard. Il me tend un gobelet. « Tu veux de l'eau ? », demande-t-il. « Non, c'est bon c'est déjà fait », lui réponds-je. Et dans mon for intérieur : « euh... ou pas ? !».
Et voilà, 3h30 de garde, un service et la descente nous séparent maintenant de Singapour, soit environ encore 5 ou 6h de vol...
Allez, images !
Singapour est malicieusement surnommée The Fine City, habile jeu de mot puisque "fine" en anglais signifie à la fois "bien, bon" et "amende". En effet, cette cité-état est régie par des règles de vie extrêmement strictes, et la moindre incartade peut vous valoir une amende salée. A titre d'exemples, ne pas tirer la chasse d'eau dans des toilettes publiques ou jeter un papier par terre vous expose à verbalisation, le chewing-gum est interdit sur l'île, de même que toute représentation pornographique. La plupart des journaux étrangers sont interdits. Le crime est punit très lourdement. Sans même parler de l'assassinat, le trafic voire la simple possession de drogue peut vous valoir la peine capitale... Et pour faire appliquer la loi, les policiers sont présents dans toute la ville, mais en civil. On ne les voit pas. Idem pour le réseau de caméras de surveillance qui quadrille la ville. L'un des plus grands au monde... Bienvenue Chez Big Brother ! Alors évidemment, les rues sont d'une propreté impeccable, et vous pouvez vous promener partout et à n'importe quelle heure du jour et de la nuit, vous êtes en parfaite sécurité. Le niveau de criminalité est ici un des plus bas au monde... Mais à quel prix ?...
Drôle de rencontre, drôle de sensation. Je vais peut-être apprendre à remplir une grille de Loto, sait-on jamais... Et je te tiens au courant, Ami Terrien.
Hey Thibz, merci encore une fois pour tes belles aventures, ça donne envie, tu racontes vraiment bien!
RépondreSupprimerEt c'est clair va jouer au loto, on sait jamais!!
Gros bizz à toi et ta douce
A bientôt